03 avril 2008

L'art de la Présence

Depuis mes toutes premières expériences avec le thé, l'aspect "sacré" de cette boisson m'a spécialement touché. Ce-dernier est resté au coeur de ma spiritualité au quotidien, quoique parfois bousculé par des aspects plus intellectuels, ne prenant cependant aucune forme de rituel. Le Chanoyu aurait pu m'intéresser mais je trouve sa forme vraiment trop rigide et sans spontanéité, en plus d'être ultra-nippone... surtout lorsqu'on sait ce qu'ils pensent des Gaijin pratiquant la cérémonie! J'apporte donc, tout simplement, beaucoup de présence avant, pendant et après (pour la vaisselle entre autre!) la dégustation. Percevoir les sensations: le silence derrière les sons, textures et chaleur, saveurs, arômes, beauté des objets, de la couleur de la liqueur, et cela sans m'accrocher aux pensées qui surviennent. Inspiré par l'enseignement du Zen et celui d'Eckhart Tolle que j'ai rencontré exactement à la même période de ma vie que celle où le thé a croisé mon chemin, cette manière de vivre en pleine conscience est l'épine dorsale de mon existence. Le thé est, pour moi, son véhicule idéal.

D'ailleurs, Stéphane de Tea Masters parle ici de l'attitude d'ouverture que le dégustateur devrait adopter pour percevoir les subtilités d'un thé. À quelque part, la présence c'est cette simplicité du regard de l'enfant qui voit avec ses yeux et son coeur, non avec son intellect.

Je découvre récemment la Voie coréenne du thé. Un Esprit bien plus simple et moins figé que celle pratiquée au Japon. Vraiment, je suis étonné à quel point il comporte des similitudes avec ma pratique personnelle. Pour ceux qui ne connaissent pas du tout ce rituel, je me permet de vous présenter un extrait trouvé ici sur le sujet résumant ses principes:

<< Dans toutes les cérémonies, les gestes essentiels restent le même. Au début le service de thé est disposé sur un plateau légèrement élevé devant celui ou celle qui va préparer le thé, couvert d’un tissu. Tous se saluent en s’inclinant, les main jointes. Puis le tissu est enlevé, plié et posé par terre. Les tasses, qui étaient rangées le haut en bas sont retournées. Du versoir, de l’eau chaude est versée dans la théière, puis de la théière dans les tasses afin de les chauffer et de les nettoyer. Une nouvelle mesure d’eau est mise à refroidir dans le versoir. Le thé est mis dans la théière avec une cuillère en bois, puis on verse l’eau chaude dessus. L’eau qui chauffait les tasses est jetée; le thé est alors servi en passant plusieurs fois d’une tasse à l’autre pour que le goût du thé soit également réparti. Chaque tasse est placée sur une sous-tasse en bois, sauf dans la cérémonie de l’offrande du thé au Buddha, quand la sous-tasse est alors en céramique. S’il y a des invités, les tasses leur sont portées; les mains jointes, chacun s’incline en signe de reconnaissance avant de boire.

 Chacun prend le temps de contempler la couleur du thé et de savourer son parfum avant de boire. Ayant bu, chacun suit la progression et l’évolution du goût sur la langue, dans la gorge, avant de savourer le goût qui reste dans la bouche. On verse une nouvelle mesure d’eau chaude dans la théière et, après une brève pause, toue l’infusion est versée dans le bol-versoir, qui sert à remplir les tasses. Ceci se répète d’habitude une troisième fois. Ensuite les tasses reviennent à la personne qui préside la cérémonie pour être lavées. Le thé est vidé de la théière, qui est lavée aussi. Quand tout est terminé, le service à thé est recouvert du tissu puis, de nouveau, chacun se salue, les mains jointes.

 “Un coeur concentré”

  De même que la Voie est ouverte à chacun, chacun est tenu d’observer l’esprit de la Voie exprimé par la phrase “un coeur concentré.” Alors que les gestes pour préparer et boire le thé sont des plus simples, ils doivent s’accomplir dans un esprit qui convient à la Voie; cela dépend de l’état d’esprit, du coeur de l’individu et se résume en quelques mots.

              Dans le décor comme dans les ustensiles, dans l’attitude et les gestes de ceux qui préparent et boivent le thé, certaines qualités sont requises: le naturel, la simplicité, la modération, l’assurance, la souplesse, la reconnaissance. Par ces mots il devient évident que la Voie du Thé coréenne, enseignée par l’Institut Panyaro, n’est point une “cérémonie du thé” formelle et ritualisée mais une “Vie du thé” où chacun pratique les valeurs les plus essentielles en accomplissant les gestes d’une des activités humaines la plus simple qui soit.

 Nous savons bien que tout dans la vie s’en va comme la neige qui fond au printemps; et pourtant il y a un fond essentiel qui ne s’en va point. Permettre à chacun de découvrir ce fond en buvant le thé: voilà l’unique but de la discipline de la Voie du thé.

Assis dans la solitude et le recueillement, là où l’on boit le thé, écoutant le bruissement leger de l’eau qui frémit sur les braises, préparant le thé, savourant son goût à la fois doux et amer, prenant conscience paisiblement des pensées qui s’éveillent, sortant de l’illusion par cette contemplation sereine, nous nous préparons à vivre d’une manière qui en soit digne: voilà la raison pour la pratique de la Voie du thé.

Purifier corps et âme par une pratique constante de la Voie du thé, atteindre à une unité en son propre être et avec la nature profonde de l’univers, et arriver ainsi à une véritable liberté: voilà le but fondamental de la pratique de la Voie du thé.

Collaborer à l’édification d’un monde plus habitable pour tous sur la base de cette nouvelle liberté: voilà un autre but pour tous ceux qui aiment le thé.

Le Zen du thé

 La ‘Voie du thé’ part du geste simple et quotidien de boire le thé pour en faire une ‘voie’ spirituelle.

Le ‘Zen du thé’ indique qu’on touche à une meditation intuitive en buvant ainsi le thé.

Le Zen est une réalité qui ne peut s’expliquer par la parole ni par l’écriture. Le Zen est concentration et prise de conscience positive.

Le Zen est éminemment libre et original, subjectif en même temps.

Le Zen offre un raccourci pour arriver à une individualité sans limites.

Tout comme le thé.

Il suffit de préparer le thé et de savourer sur le bout de la langue ses six goûts: amer, âpre, acide, salé, poivré, sucré.

Le thé et le Zen doivent constamment gouverner et diriger le corps et le coeur; c’est seulement ainsi que vous arriverez à ce niveau.

Voilà pourquoi l’on dit, ‘le thé et le Zen ont une même saveur,’ et encore, ‘le thé et le Zen sont un.’>>


Et voici, comme si ce n'était pas assez, un autre lien ici vers l'article de Wikipédia (en anglais) sur le sujet. 

En image:


2 commentaires:

Michel a dit…

es- ce extrait du korean book of tea?

Savait tu que l'esthéitique japonais du thé est basé sur des bols à riz de paysans coreens..

Les plus belles ceramiques pour moi celles qui ont une conscience du pur du beau du simple du etre sans classe ni surprésence ..
Qui capture l'homme at his best, his most giving.
Pu chong
Achete"Earth spirit fire Korean masterpieces of the chosong dinasty"

venant tout droit de provence , a dit…

c'est vraiment beau ce que tu ecris , cela me touche .
le thé est effectivement bien plus que de boire une tasse : c'est etre present !